La Commission européenne accuse TikTok d'avoir enfreint la loi sur les services numériques (DSA), un texte législatif européen essentiel visant à garantir la transparence et la responsabilité en ligne. L'enjeu ? Non seulement de lourdes sanctions financières, mais aussi l'avenir même du dialogue démocratique en Europe.
Pourquoi l’UE cible-t-elle TikTok ?
L'UE se plaint de TikTok car l'entreprise n'a pas rendu publique sa bibliothèque publicitaire, contrairement à ce qu'exige la loi sur les services numériques (DSA). Cette bibliothèque est un outil qui aide les chercheurs et les groupes d'intérêt public à visualiser et à étudier les contenus payants. Elle est conçue pour démasquer les campagnes qui tentent de tromper les gens ou de diffuser de fausses informations.
Selon la Commission, TikTok ne divulgue pas clairement des informations vitales telles que :
- Qui finance une publicité,
- À qui s'adresse l'annonce,
- Et quel type de message est promu ?
Ce manque d'ouverture devient encore plus dangereux en période électorale, lorsque l'intégrité du débat public est la plus vulnérable. Sans transparence totale, il devient beaucoup plus difficile de détecter les fausses publicités, les campagnes d'influence coordonnées ou les ingérences étrangères.
C'est la première fois qu'une enquête liée à la DSA contre TikTok atteint sa phase finale – un signal clair que l'UE est sérieuse.
TikTok a réagi. Un porte-parole de l'entreprise a déclaré que TikTok soutenait les objectifs de la DSA et travaillait continuellement à l'amélioration des outils de transparence publicitaire.
Parallèlement, la plateforme a critiqué l'UE pour son manque de « directives claires et publiques » et a contesté certaines interprétations de la loi par la Commission. L'entreprise a néanmoins affirmé sa volonté de poursuivre sa coopération avec les régulateurs européens.
Bots et bulletins de vote : TikTok alimente-t-il l’ingérence électorale ?
Mais il ne s’agit pas seulement de publicités.
En décembre dernier, la Commission européenne a ouvert une enquête distincte sur une possible ingérence dans l'élection présidentielle roumaine. L'enquête a débuté peu après l'annulation des résultats par la Cour constitutionnelle du pays.
La crainte ? La désinformation liée à la Russie, diffusée via TikTok, pourrait avoir influencé le vote.
L'enquête se concentre sur plusieurs aspects : la manipulation potentielle de l'algorithme de recommandation de contenu de TikTok par des robots, la promotion de publicités politiques et de leurs sources de financement, et la vérification insuffisante de ceux qui financent les publicités politiques.
Un candidat en particulier, Călin Georgescu , aurait bénéficié d'un soutien coordonné via des influenceurs TikTok et des chaînes Telegram. Sa campagne aurait bénéficié d'un financement opaque et d'une visibilité déloyale, violant potentiellement les règles de la compétition électorale. C'est l'une des principales raisons pour lesquelles la justice roumaine a invalidé l'élection.
Quelles sont les conséquences ?
Si la Commission européenne confirme que TikTok a violé le DSA, la plateforme pourrait faire face à des sanctions financières massives – jusqu’à 6 % de son chiffre d’affaires annuel mondial.
Mais ce n'est pas tout. TikTok pourrait également être contraint de mettre en œuvre immédiatement des mesures correctives.
transmettre les documents et données internes relatifs aux risques potentiels et assurer une coopération totale avec les futurs efforts de surveillance.
Ces mesures s’inscrivent dans le cadre d’une initiative plus large de l’UE visant à protéger les élections et le discours civil des menaces systémiques en ligne.
TikTok affirme refuser la publicité politique payante et supprimer activement les contenus favorisant la désinformation, les discours haineux ou le harcèlement. Malgré cela, la Commission reste sceptique et poursuit son enquête.
Véritable responsabilité ou illusion numérique ?
Les problèmes de TikTok en Europe sont loin d’être terminés.
En février 2024, la Commission a lancé une nouvelle enquête , concernant, entre autres, le risque de dépendance des utilisateurs, le manque de transparence dans la publicité et l'accès limité des chercheurs aux données de la plateforme.
Les inquiétudes étaient suffisamment sérieuses pour qu’en août 2024, l’ UE suspende l’application TikTok Lite en raison des risques d’addiction.
Pour la Commission, ces mesures s’inscrivent dans une stratégie à long terme visant à protéger la souveraineté numérique et les processus démocratiques de l’Europe.
Henna Virkkunen, vice-présidente de la Commission chargée de la souveraineté technologique, a souligné que l'Union avait le devoir de lutter contre la manipulation, quelle que soit son origine.
Quelle est la prochaine étape ?
À l’approche des élections européennes, les plateformes comme TikTok — désormais officiellement classées comme très grandes plateformes en ligne (VLOP) en vertu de la DSA — seront soumises à une surveillance étroite.
Pour l'UE, il ne s'agit pas seulement d'une application. Il s'agit d'un test de résistance pour la législation numérique de l'UE et d'un tournant pour l'approche du continent en matière de sécurité de l'information.
Il reste à voir si TikTok s’adaptera ou subira des conséquences, mais une chose est claire : l’UE est déterminée à rendre la démocratie à l’épreuve des algorithmes.
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Façonner la conversation
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